La Covid-19 au prisme de Molière (3/3)

Première partie : Molière dans le texte

Deuxième partie : Orgons et Tartuffes au XXIème siècle

Troisième partie : De Molière à Charlie Hebdo et de Louis XIV à Emmanuel Macron

L’homme est un animal rationalisant

Le propre de l’homme n’est pas d’être un animal rationnel mais un animal rationalisant. Si c’était la pure logique qui régnait en maître dans tous les esprits, les médias et le gouvernement auraient atteint une crédibilité proche de zéro dès le début du mois d’avril, et une ribambelle de têtes seraient tombées au plus haut niveau. Le bon sens est peut-être « la chose du monde la mieux partagée », disait Descartes, mais La Fontaine avait aussi raison : « L’homme est de glace aux vérités, il est de feu pour le mensonge ». Plus récemment, San Antonio, lui aussi ami des bêtes, avait cette image : « Les humains, ce sont des mulets pensants. Plus vous essayez de vaincre leur entêtement, plus ils se butent ». La tendance rationalisante de l’homme se révèle quand il se trouve placé face à une dissonance cognitive, c’est-à-dire une situation où ce qu’il perçoit entre en contradiction radicale avec ses convictions. Le phénomène a été nommé et étudié par Léon Festinger dans L’échec d’une prophétie : le gourou d’une secte avait annoncé à ses adeptes que la fin du monde aurait lieu tel jour et à telle heure, et les avait invités à assister tous ensemble au spectacle depuis le sommet d’une colline, en leur assurant qu’ils seraient les seuls à être sauvés in extremis par des extra-terrestres venus depuis la planète Clarion dans une soucoupe volante. L’heureux événement tardant à se produire, les adeptes entrèrent en patience, et pendant de longues heures défièrent, les yeux rivés sur l’horloge, l’échec de la prophétie. Cependant, de son côté, le gourou qui était une femme répondant au nom de Marian Keech cogitait ferme, et la solution lui vint opportunément par un message des extra-terrestres dicté au cours d’une soudaine transe d’écriture automatique : Eu égard à la sagesse et l’amour manifestés par ces quelques élus qui avaient daigné entendre le message, Dieu avait décidé de sauver la Terre et l’Humanité de la destruction. Immensément soulagés et le cœur gonflé d’allégresse, tous les fidèles alors redescendirent de leur colline, et loin de remettre en question les talents du devin qui les avait envoûtés, se mirent à répandre la bonne nouvelle avec un prosélytisme décomplexé, et purent ainsi, comme si de rien n’avait été, reprendre le cours de leur onirique existence.

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Du conflit syrien au conflit français, une couverture médiatique inversée

En mars 2011, éclatait le confit syrien, dans le sillage du Printemps arabe. Comme pour les autres pays précédemment atteints par la vague, la Tunisie, l’Égypte et la Libye, les médias unanimes ont présenté ce conflit comme le soulèvement courageux d’un peuple tentant pacifiquement de secouer le joug d’un régime ignoble dirigé par un abominable dictateur. Ceux qui se montraient dubitatifs et prétendaient faire entendre un autre son de cloche, ont vite été réduits au silence, exclus de tous les débats, traînés dans la boue et traités de tous les noms, en particulier de ceux de « complotistes » et de « conspirationnistes »i.

En novembre 2018, éclatait ce qu’on pourrait appeler, quoique les proportions demeurent incomparables, le « conflit français ». Initié par les « gilets jaunes » il a vite fait tache d’huile dans toute la France. Au-delà du problème du prix du carburant, les gilets jaunes expriment leur défiance envers le système tout entier et semblent même de plus en plus réclamer, osons l’expression, un « changement de régime ».

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